Archives d'articles de presse

Extraits de presse sur la parution de la biographie d'Antonin Dvorák par Guy Erismann, Fayard 2004.


Radio Praha, émission du 4 janvier 2007 :


Un nouveau livre sur Leos Janacek paraît en France
[04-01-2007] Par Magdalena Hrozinkova, Radio Praha émissions en langue française.
Guy Erismann, musicologue, historien et spécialiste de la musique tchèque publie, en ce début d'année, aux éditions du Seuil, une biographie de Leos Janacek. Le livre succède à ses volumes sur Dvorak, Smetana et Martinu, ainsi qu'à un ouvrage sur l'histoire générale de la musique tchèque.
G.E. : « Ce n'est pas tout à fait un nouveau livre, c'est la première biographie française de Janacek qui est parue en 1980. Ce livre qui a aujourd'hui plus de 25 ans, je l'ai retravaillé et beaucoup augmenté. J'ai mis des indexes, des catalogues etc., de sorte qu'on peut considérer quand même que c'est un nouveau livre. C'est la 3e édition revue, corrigée et augmentée. »
Qu'avez-vous rajouté de nouveau ?
« Plein de choses que je ne connaissais pas quand j'ai écrit le livre, par exemple sur le Danube, sur le Concerto pour violon, et puis j'ai beaucoup étoffé toute la partie ethnomusicologique que je ne connaissais pas très bien à ce moment-là. J'ai ajouté également des détails biographiques que j'ignorais et des réflexions personnelles, j'ai fait une nouvelle préface. Le livre s'appelle 'Leos Janacek ou la passion de la vérité' et j'explique pourquoi, qu'est-ce que c'est que la vérité en musique ? »
Qu'est-ce que c'est alors ?
« C'est difficile, parce que c'est un peu philosophique... Mais je pense que la vérité en musique est totalement différente de ce qu'on pourrait appeler le réalisme ou l'expressionnisme ou même le naturalisme. C'est beaucoup plus profond et beaucoup plus durable. Car c'est la vérité profonde qui est aussi vieille que l'homme. C'est-à-dire, c'est la vérité de l'homme à travers la musique et à travers l'histoire de la musique. »
Il y a encore des choses à découvrir chez Janacek, même pour vous ?
« Ah oui, on découvre toujours ! Pour moi, c'est un personnage inimitable, inégalé, comme compositeur, comme homme, comme nature humaine. Il y a de bons côtés, très enthousiasmants, il y a aussi des côtés un peu contestables... Mais c'est un homme qui est d'une telle vérité qu'on veut le prendre comme modèle et qui peut servir de modèle surtout aux autres compositeurs. En France, on ne connaissait pas Janacek il y a 20 ou 25 ans. Maintenant, de jeunes compositeurs s'intéressent à lui, parce qu'il a su garder, conserver, inventer sa propre personnalité et raison d'être. Justement, les jeunes créateurs d'aujourd'hui sont à la recherche de leur propre vérité. Voilà la leçon de Janacek : la vérité est en vous, travaillez avec elle. »



Le Figaro Littéraire


jeudi 2 septembre 2004, p. 6
Dvořák, le symphoniste du nouveau siècle
Si l'arbre cache souvent la forêt, pour ce qui concerne Antonin Dvořák (1841-1904), deux chênes de large envergure (Symphonie du nouveau Monde, Danses slaves) et quelques platanes (trio Dumky, concerto pour violoncelle, l'opéra Rusalka) ont maintenu dans l'ombre les trésors d'une Brocéliande tchèque dans laquelle on se perdrait volontiers. A l'aune des contemporains Brahms et Tchaïkovski, on objectera que ce n'est déjà pas si mal, et la comparaison avec son compatriote Bedrich Smetana (1824-1884), passé à la postérité pour sa seule Moldau, est tout à l'avantage de Dvořák.

Restent les initiés et les mélomanes aventureux, qui connaissent les beautés des huit autres symphonies, du Stabat Mater, du Requiem, des quatorze quatuors à cordes, des poèmes symphoniques de 1896 (L'Ondin, la Fée de Midi, Le Rouet d'or, La Colombe sauvage), des Chants bibliques, des opéras Le Roi et le Charbonnier, Le Jacobin, ou encore d'innombrables pièces pour piano, chants populaires tchèques, moraves, serbes, lituaniens, morceaux de musique de chambre où surgissent harmonium, contrebasse, clarinette et violons.

Prolifique, certes, mais inspiré à la mesure de cette facilité à écrire que lui envieront ses amis Brahms et Janáček. Dvořák apparaît cependant, au fil des pages de la biographie que lui consacre Guy Erismann, comme un travailleur acharné, homme simple de souche paysanne, attaché à sa terre natale et à de solides valeurs familiales et religieuses. C'est dans une Bohême sous tutelle habsbourgeoise qu'il est initié à la musique. Les fêtes de village, les mélodies populaires, les instruments d'église ou d'harmonie lui donne son climat sonore immédiat. Passé une courte période de fascination pour le modèle wagnérien, Dvořák s'engage, aux côtés de Smetana, dans la voie d'un renouveau de la musique nationale tchèque, qu'il libère de la langue, de l'emphase et des mythologies allemandes. Il fait preuve d'une curiosité d'esprit et d'un incomparable flair d'artiste pour humer la moindre mélodie qui passe et en faire resurgir le suc sans qu'il soit possible de déceler autre chose que de l'imagination, du savoir-faire et un style, une signature immédiatement identifiable.

On a peine, aujourd'hui, à imaginer la popularité exceptionnelle que Dvořák a connue de son vivant, tant en Europe qu'aux Etats-Unis où il fut appelé, contre un cachet de star, à diriger le conservatoire de musique de New York. La relation de ce séjour outre-atlantique est d'ailleurs savoureuse : elle nous éclaire sur l'ambivalence d'un Dvořák tiraillé entre le mal du pays et son instinct de compositeur, l'oreille en alerte, ne perdant rien des gospels noirs et des chants funéraires indiens qui distilleront leur mélancolie au beau milieu des harmonies et des rythmes tchèques dont sont constitués le quatuor Américain et la Symphonie du Nouveau Monde...

Le cheminement artistique de Dvořák est habilement mis en perspective par Guy Erismann dont les précédents travaux sur Janáček et les musiques d'Europe centrale font autorité. Sa connaissance intime et sensible des compositions de Dvořák aide le lecteur à dénouer l'écheveau de cette production touffue dont chaque élément est replacé ici dans son contexte historique, intellectuel et privé. Si, parfois, la chaleur du commentaire conduit à un excès d'indulgence pour des pièces un tantinet creuses ou anecdotiques, les analyses restent cependant bien proportionnées et évitent toute cuistrerie. Les dernières années de création nous montrent un artiste attiré par les mystères et la noirceur des légendes écrites par le poète Karel Erben. Il écarte de sa musique les références au pittoresque, au folklore, et hisse son écriture à des niveaux de raffinement qui lui valent la reconnaissance de la bonne société viennoise, toujours encline à juger ce Bohémien par trop nationaliste.

"Si, avec son chef-d'oeuvre Rusalka (1901), le vieux Dvořák avait ouvert le XXème siècle, il fermait en même temps celui qui fut le sien et celui de Smetana", laissant le champ libre à l'autre grand novateur tchèque, Leoš Janáček. Les révolutions sont à venir: Debussy, Schoenberg, Stravinsky redéfiniront le langage musical. Antonin Dvořák, quant à lui, s'est fait, sans compromission ni opportunisme, le héraut sans armes et au plus haut niveau de créativité d'un peuple trop longtemps méprisé. La musique comme fer de lance de la dignité d'un peuple : il y a du Verdi dans cette histoire-là. Philippe Cassard



Classica Répertoire


n° 64 juillet - août 2004
A l'occasion du centenaire de sa mort
Dvořák : sa vie, son oeuvre
Il nous manquait une biographie en langue française de l'auteur de la Symphonie du Nouveau Monde. C'est chose faite par l'un des meilleurs spécialistes de la musique slave et de l'univers tchèque en particulier. L'oeuvre de Dvořák ne peut s'analyser sans un retour aux sources de l'Histoire des peuples du Danube. Le contexte social, politique et économique est analysé. Mais le premier intérêt de cet ouvrage est de nous faire découvrir le musicien presque au quotidien, ses réactions personnelles face à ses succès (notamment en Angleterre) et devant ses drames familiaux. Guy Erismann nous avait déjà proposé une petite biographie du compositeur (Seghers) mais le travail qu'il livre aujourd'hui est d'une toute autre ampleur. Après ses ouvrages sur Leoš Janáček, Bohuslav Martinů et Bedřich Smetana, Guy Erismann nous aide à mesurer l'originalité et l'influence de l'écriture de Dvořák sur ses contemporains. L'auteur explore l'identité du compositeur et décrypte ses rapports complexes avec les univers slaves et germaniques. Dvořák n'a assurément pas révolutionné l'écriture romantique, mais il a intégré les sources populaires dans le répertoire de la musique savante comme nul autre ne l'avait fait avant lui à une telle échelle. Guy Erismann nous convainc de la modernité de cette écriture. Une première grande biographie française claire et juste. Stéphane Frédérich.



Le Soir (Bruxelles)


26 mai 2004
Antonín Dvořák, chantre du peuple tchèque
Enfin le livre qu'on attendait sur le compositeur de la "Symphonie du Nouveau Monde !
Antonín Dvořák est mort le 1er mai 1904. Plus qu'un compositeur, c'est l'âme de tout un peuple qui s'en est allée avec lui. Il était temps que paraisse en langue française un ouvrage digne du génie du créateur qui, au départ de son admiration pour Wagner et en passant par l'influence de Johannes Brahms, est devenu le symbole musical d'un pays et d'une culture.

Guy Erismann est l'homme tout indiqué pour nous guider à travers le parcours d'un compositeur dont l'oeuvre est tout sauf un avatar folklorisant du romantisme triomphant. Musicologue et historien, Guy Erismann a fait une longue carrière à Radio France et à France Culture. Passionné par la musique tchèque, il a largement contribué à la faire connaître en France à partir des années 80, à une époque donc où elle était la plupart du temps superbement ignorée.

Auteur, déjà, d'un livre consacré à Dvořák en 1966 (Seghers), il a également écrit des ouvrages de référence sur Janáček (Seuil, 1980), Martinu (Actes Sud, 1990) et Smetana (Actes Sud, 1993). En 2002, un premier livre publié chez Fayard portait pour titre "La Musique dans les Pays tchèques", un ouvrage extrêmement documenté où il aborde tout aussi bien l'amour de Mozart pour Prague que les grands compositeurs romantiques tchèques, signe un portrait de Gustav Mahler en compositeur tchéco-morave et dresse un panorama complet de la musique tchèque contemporaine, accordant une place particulière aux musiciens morts au camp de concentration de Terezín.

La célébration du centenaire de la mort de Dvořák lui permet de revenir sur la personnalité de celui qui est sans conteste le plus populaire des musiciens de Bohême, celui qui a assis la véritable tradition de laquelle s'est nourrie la musique tchèque moderne.

Mais où Dvořák lui-même a-t-il planté ses racines, d'où vient-il ? On ne s'est jamais vraiment posé la question, pas plus qu'on ne le fit pour Smetana, affirme Guy Erismann dans le prologue de son livre. Et l'auteur interroge les origines, cette école de la patrie et de la terre, dirigée par les kantors, ces obscurs maîtres, attentifs et intuitifs.

Bien sûr, Smetana était attiré par Liszt et Wagner. Le jeune Dvořák a été fasciné par le maître de Bayreuth, alors que sa formation et ses goûts le portaient naturellement vers Mozart et Schubert, et que le modèle beethovénien demeurait sa référence. G. Erismann poursuit: "Dvořák s'affranchira des séduction wagnériennes au profit d'une voie slave particulièrement féconde, dont il saura se démarquer, évitant de sombrer dans la recette conservatrice de la musique populaire comme modèle unique. Il sut passer du populaire au savant, de l'instinctif au culturel, de l'ethnique à l'universel, ainsi qu'en témoignent ses grands oratorios, ses symphonies et ses quatuors, au fil d'une carrière merveilleusement féconde au cours de laquelle son génie parvint à s'épanouir avec le plus grand intérêt. On remarquera qu'il n'a jamais été aussi profondément tchèque que dans les glorieuses circonstances américaines, quand ce modeste fils d'aubergiste-boucher de village fut appeler à diriger le Conservatoire de New York.

Ces quelques lignes donnent le ton d'un ouvrage où l'auteur entend nous faire partager son enthousiasme lucide, celui qu'il déploie à parcourir le cheminement d'un artiste pour lequel il ressent une profonde admiration. Ce livre s'adresse à tous les mélomanes, quel que soit leur degré de connaissance musicale. Erismann n'écrit pas en musicologue pointu, et son livre est strictement chronologique : il n'y a pas d chapitres séparés pour l'analyse des oeuvres, qui sont appréhendées dans le cours du déroulement biographique, année par année. Par commodité, le corps du livre est divisé en cinq parties, suivies des habituelles annexes (table des matières, index, catalogue). Le catalogue n'a pas été distribué par genres, il est lui-même strictement chronologique: les genres sont précisés en même temps que le titre et rappelés dans la dernière colonne par un sigle particulier. Les illustrations sont peu nombreuses, on en a l'habitude chez Fayard, et l'on pourrait regretter l'absence totale de tout extrait musical noté qui pourrait illustrer - comme cela se pratique couramment - les oeuvres commentées par l'auteur. Mais, encore une fois, il faut insister sur le fait que les commentaires ne sont pas "techniques" : ils sont destinés à éveiller l'intérêt d'un public le plus vaste possible, curieux de découvrir l'oeuvre d'un compositeur qui aimait expliquer : Quoique j'aie eu l'occasion de fréquenter le grand monde musical, je n'aime pas une obséquiosité exagérée; je reste toujours ce que j'ai été : un musicien tchèque tout simple.

Tout ceci ne signifie pas que le livre de Guy Erismann ne soit pas destiné aux mélomanes les plus au fait de la chose musicale. Les analyses de l'auteur sont subtiles et superbement étayées par une connaissance profonde du sujet qu'il aborde. Mais il sait, lui aussi, rester "tout simple" lorsqu'il aborde des sujets aussi délicats que l'harmonie chez Dvořák, par exemple : l'analyse ne permet pas toujours de percer les secrets de fabrication dans le domaine artistique. Il reste toujours une part de mystère dans chaque individu, notamment celle qui distingue l'artiste véritable du besogneux. Cette part-là ne se définit pas. C'est ainsi que l'harmonie de Dvořák qui n'apparaît ni neuve ni originale en soi est propre à piquer la curiosité. Le miracle réside peut-être dans l'étroite association de la mélodie et du rythme qui sont les caractéristiques de l'incroyable jaillissement du compositeur. Elle procède de l'une et de l'autre, comme se formant spontanément au fur et à mesure que ces éléments, les plus directement populaires - qu'on pourrait qualifier d' "instinctifs" - se présentent à sa pensée. C'est un peu comme si, par enchantement, l'harmonie se colorait d'elle-même au gré des fluctuations mélodiques et rythmiques de l'inspiration.

Parlant de la "soif naturelle de mélodies" qui animait Dvořák, il précise également : "Les esquisses de l'on a retrouvées, notamment celles des Danses slaves, ou bien celles notées sur ses Carnets américains, montrent à quel point il engrangeait de réserves. Il avouait lui-même avoir une belle idée n'a rien d'extraordinaire, mais l'appliquer et en faire quelque chose de grand, c'est plus difficile."

Cet amour de la mélodie, Dvořák l'a étendu aux musiques rencontrées lors de son séjour américain, ainsi qu'en témoigne cet entretien accordé au journal New York Herald : "Les thèmes si beaux et si variés, sont le produit du sol, dit-il à propos des chants des plantations. Ce sont les chansons populaires de l'Amérique, et vos compositeurs doivent s'en inspirer. Dans ces mélodies nègres, je découvre tout ce qui est nécessaire pour une grande et noble école musicale..."

De telles lignes ont évidemment suscité des réactions diverses aux Etats-Unis, mais Dvořák s'est toujours exprimé avec sincérité, au risque de scandaliser lorsqu'il proclamait son intérêt pour l'héritage des tribus indiennes disloquées, ou pour les mélodies de Stephen Collins Foster, à mi-chemin entre la chanson populaire et la mélodie de salon. C'est aussi l'un des traits que l'on continuer d'admirer - et le livre de Guy Erismann nous y porte sans ambiguité - chez Antonin Dvořák : la grande ouverture de ses goûts musicaux, alliée à une rigueur sans concession dans l'art d'écrire la musique. C'est peut-être l'une des plus grandes leçons que continue de nous donner aujourd'hui ce grand créateur, mort il y a tout juste cent ans. Michel Debrocq.



Diapason


octobre 2004
Le fils du boucher
On ne sera guère étonné que cette première grande biographie d'Antonin Dvořák en français soit due à Guy Erismann : qui, mieux que lui, aime et connaît la musique tchèque ? Après Janacek, Martinu et Smetana, le voici qui revient vers un compositeur auquel il avait déjà consacré un court ouvrage chez Seghers, voici presque trente ans. Il le fait avec sa simplicité coutumière, dans un cadre classique mais toujours efficace qui suit pas à pas la vie et l'oeuvre. Ce pourrait être un conte de fées : comment le fils d'un modeste boucher-aubergiste (mais qui jouait de la cithare) devint l'une des figures emblématiques de la musique tchèque. Une enfance pauvre mais, grâce à l'instituteur Josef Spitz, la découverte de la musique, du chant, du violoncelle, de Mozart et de Haydn. Dans la ville voisine, Zlonice, l'adolescent soutenu par le kantor Antonin Liehmann, s'exerce au piano, à l'alto, à l'orgue, à la composition, alors qu'il est censé apprendre le métier de son père. La vocation l'emporte. Mais le chemin est dur et long dans un pays qui supporte de plus en plus mal la domination des Habsbourg. Dvořák cherche lui aussi son identité, entre ses racines populaires et la musique savante, celle de Wagner, de Liszt, et n'est pas sans subir l'influence de Smetana. Son activité créatrice est féconde, sa vie privée difficile, et douloureuse, marquée par le décès de plusieurs enfants. Pourtant, dès 1880, alors qu'il n'est pas encore quadragénaire, il est devenu un personnage officiel. Et sa réputation s'étend à l'étranger : l'Angleterre l'accueille dans l'enthousiasme, New York lui offre la direction de son conservatoire. Le conte de fées le plus moral qui soit s'achève voici tout juste cent ans. En cette année commémorative, avec une ferveur qu'il sait faire partager, se fait le champion d'un musicien encore mal connu, au moment où le pays dont il demeure l'une des icônes entre dans l'Union européenne. M.P.



Biblioteca Magazine


n° 93 - mai 2004
S'inscrivant dans le mouvement nationaliste qui anima la vie politique tchèque du XIXe siècle, Dvořák (1841-1904), à la suite de Smetana, s'inspira de thèmes patriotiques, de mélodies et de rythmes populaires. Il prit également pour modèles les auteurs de musique savante allemande, en particulier Brahms. Son oeuvre réalise ainsi un équilibre entre l'élément populaire et le grand modèle occidental de la forme musicale. Guy Erismann s'attache aussi à montrer la place que Dvořák occupe dans la musique et la civilisation de son pays d'origine.



Le Monde des Livres


vendredi 18 juin 2004
Antonin DVOŘÁK. Le génie d'un peuple.
Près de quarante ans après sa première tentative -entre-temps il a offert une édition de l'Autobiographie de Rimski-Korsakov, des études sur Janacek, Martinu, Smetana et une belle synthèse sur La Musique dans les Pays tchèques-, Erismann revient sur la figure de Dvořák, mort en 1904. Accueilli à Moscou, Londres et Saint-Pétersbourg, il dirigea pendant deux ans le conservatoire de New York, s'attacha à ce Nouveau Monde auquel il dédia sa plus célèbre symphonie, sans oublier sa terre natale - cette Bohême dont il fit l'écrin miraculeux de sa Rusalka (1901), assimilant tradition populaire et musique savante, fonds païen et mystique diffus. C'est de l'authencité de sa saveur que l'oeuvre de Dvořák tient sa dimension universelle - mieux, son exemplarité dans un temps où le folklore intéresse au péril de sombrer dans le pittoresque. A recommander aussi pour les analyses musicales, claires et étayées. Ph.-C. C.



Concert du jeudi 6 mars 2008 en hommage à Guy Erismann


Radio France, studio 105
Présentation par Marc Dumont

A lire le programme, une pièce attirait immédiatement l’attention : le Trio n° 1 H136 de Martinů. Cette composition, écrite en 1923 - Martinů avait 33 ans - alors qu’il était tout juste arrivé à Paris, était considérée comme perdue par tous les spécialistes de Martinů, jusqu’au jour où, récemment, elle fut découverte dans une bibliothèque danoise. On imagine sans peine que le trio formé de musiciens de l’Ensemble Calliopée (Maud Lovett, Karine Lethiec et Romain Garioud) était animé d’une toute particulière émotion dès l’idée même de donner la première de cette composition dont les qualités d’inspiration, de fraîcheur et déjà de maturité sont en tous points remarquables. L’interprétation que nous en avons entendue hier soir était sans conteste habitée de cette joie de faire partager leur découverte.
Marc Dumont nous a lancé dans un concert qui n’avait ici plus rien d’imaginaire mais acquérra sans doute ce supplément d’image mentale lors de sa diffusion le 8 mai prochain sur France Musique. Son commentaire nous a replongé dans l’univers qu’aimait tant Guy Erismann et n’a pas manqué de rappeler son engagement indéfectible pour semer la bonne parole au service de la musique tchèque.
Quatre œuvres étaient au programme, jouées chacune par des interprètes différents dans une participation généreuse à cet événement. De Dvořák, nous avons entendu le Trio n°3 op. 65 par le Dumky Trio (Pierre-Olivier Qeyras, Frédéric Lagarde et Véronique Marin). De Martinů, outre le Trio n°1 déjà cité, la pétillante et parfois grave Sonatine H356 pour clarinette et piano par Staffan Mårtensson et Frédéric Lagarde, et de Janáček, Pohádka pour violoncelle et piano, par Raphaël Perraud et Laurent Wagschal.
Cet fut un enchantement de tous les instants où l’on pouvait palper dans l’air l’intense communion entre les auditeurs, au premier rang desquels Michelle Erismann, et des musiciens qui chacun rendait lui aussi par son interprétation un hommage sensible à Guy Erismann.
Si le studio 105 est un peu sec et ne se prête pas idéalement à la musique de chambre, on entendra certainement lors de sa diffusion sur les ondes comment la prise de son de France Musique aura su « réchauffer » les sonorités et traduire l’atmosphère de recueillement de cette soirée. Que tous ceux qui ont œuvré à ce concert exceptionnel soient ici remerciés.





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